Cécile Planchais : Exposition “La beauté d’une ville“ | CONTROVERSES ESTHÉTIQUES ET TRANSITION ÉCOLOGIQUE À PARIS

Un grand merci pour cette exposition au Pavillon de l’Arsenal de PARIS en février 2022.

“Cette exposition ose parler de la Beauté, reconnaître que Patrimoine et Design cohabitent à Paris, que la discrétion peut faire preuve de distinction, de continuité donc d’évolution. La culture de l’esthétique pérenne de la Ville de Paris est une constante depuis 150 ans pour certains mobiliers, qui sont, pour quelques-uns, adaptés aux nouvelles technologies dans le respect de leurs dessins et implantations.  Ce choix esthétique étendu au design, aux œuvres d’art et créations éphémères, contribue à affiner notre regard sur Paris “ Ville lumière, sensible, sensorielle, multi culturelle ! “

L’exposition “ La beauté d’une ville  » fait état des multiples débats qui ont donné lieu à l’ancrage de l’image du mobilier urbain parisien. J’ai été invitée à y participer en tant que membre de la CMU, Commission du Mobilier Urbain de 2009 à 2014. Parmi les multiples acteurs urbains consultés, le design y a donc eu sa place attitrée.  Pour les trois mobiliers représentés sur cette affiche, je me suis intéressée en priorité à la « beauté du geste » :

–  Transformer une borne technique en objet de valorisation des places de marché.

–  Offrir l’eau à boire à proximité de chacun.

–  Inviter les habitants à donner leurs vêtements.

(Coffret de collecte de vêtements sélectionné par le Janus de la Cité).

Attirer l’attention sur le design de l’eau dans le cadre de la création d’une fontaine est une première en 2005. L’actualité de la semaine mondiale de l’eau nous rappelle combien l’eau est un bien précieux à préserver. Ancrer durablement cette pratique urbaine de distribution de l’eau potable a nécessité beaucoup d’observations sur site, de protocoles et de mise en valeur de l’environnement, ce que j’ai étudié et suivi pendant 10 ans avec la Ville de Paris. Elle a été “le gardien du temple » pour la part esthétique, tandis que Eau de Paris a concrétisé son projet de multiplication des points d’eau, en étudiant et implantant ces deux fontaines.

L’étude de la borne-fontaine des marchés a démarré en 2001. La Ville de Paris avait lancé une consultation en vue d’une nouvelle norme sanitaire à appliquer à la distribution d’eau potable sur les marchés. Son mécanisme n’étant pas compatible avec les petites fontaines Wallace, le design attendu pour cette borne devait s’inscrive dans la continuité du mobilier urbain parisien existant.  J’avais été lauréate de cinq appels d’offre internationaux sur le design spécifique à Paris et mes précédentes études et réalisations pour des villes et des régions françaises et européennes m’avaient appris à raisonner à long terme, pour que la création spécifique de mobilier urbain et d’éclairage intègre la maintenance et le réassort.

La fontaine à Boire Arceau est née de la demande des Parisiens qui ont aussi voté son implantation.

Après avoir dépassé cet  » à priori « qui veut que le design ne s’applique qu’aux objets et sites prestigieux, j’ai pris le parti de donner l’eau à « voir à proximité de tous « , soit hors place des marchés, en dessinant un objet qui « raconte » comment l’eau issue des multiples sources situées hors de Paris, jaillit à Paris à hauteur “ d’homme. »  

Ces 54 fontaines, baptisées Arceau par Eau de Paris, signalent de loin aux passants ce point d’eau à boire “ à la volée “.  Son jet d’eau tressé jaillit de cet anneau, qui se courbe pour vous offrir de l’eau fraiche sans vous éclabousser….
Boire debout, face au paysage, remplir un petit récipient, jouer avec l’eau … est une véritable réjouissance, que nous notons en particulier place de la République. Elle est due à sa deuxième sortie, d’eau située en partie basse, qui la rend accessible aux personnes à mobilité réduite avec qui nous l’avons étudiée, aux enfants et à tous types d’usage nécessitant un débit plus important.

Approche durable : étapes de conception, évolutions

Pour répondre à la durabilité exemplaire du mobilier historique et valoriser l’eau, élément vivant et vital de l’environnement, je me suis intéressée à tous les nouveaux usages qui ont amené Paris à multiplier ses points d’eau : se restaurer hors de chez soi, pratiquer le sport dans la rue, utiliser les modes de déplacement doux, la présence de la nature en ville liée aux marchés parisiens ou aux nouvelles distributions alimentaires … Toutes ces évolutions nécessitent de ne pas avoir comme seul recours, l’eau en bouteille.

Au-delà de l’objet, mon objectif est de développer de nouvelles pratiques, qui amène l’utilisateur à s’approprier ces objets, à aimer partager ce bien commun, à apprécier Paris au point de communiquer son enthousiasme. Ces nouvelles pratiques sont liées aux sens, à la communication, à la sensibilisation à environnement et aux différentes cultures. Elles impliquent un design capable d’évoluer avec les usages et technologies qui changent très vite.

Pour ne pas limiter une forme à une actualité mais anticiper l’avenir, j‘utilise des sources d’inspiration et des outils variés pour réinventer mes modèles sans engager de gros travaux. Mon design peut ainsi traverser le présent et se renouveler, sans changer de forme.

L’impact de cette étude en France et à l’international
La petite taille de cette fontaine à boire a permis de réduire son coût et de multiplier les points d’eau dans Paris. La version “borne des marchés “ est posée sur tous les emplacements de marchés mais reste réservée à Paris. Sa version « à boire  » a été développée grâce aux parisiens, qui l’ont élue dans le cadre du Budget participatif de Paris en 2016. Depuis, l’eau est ainsi distribuée par ces 313 fontaines dans Paris Intramuros.

Les innovations –

Grâce à tous les intervenants liés à cette étude,

– La fontaine Arceau parisienne est un modèle inclusif reconnue par d’autres villes :  Luxembourg l’a adoptée pour équiper tous les nouveaux aménagements du Grand Luxembourg depuis 2013.
– Le design de son bouton-poussoir temporisé installé à l’arrière, a été développé par des industriels français.
– Sa technique de distribution d’eau, développée par Eau de Paris a fait l’objet d’une publication scientifique.
– la Société GHM, son fabricant a mis au point une technique de fonderie spécifique et édite sa version O’ claire, hors Paris Intramuros.

Retrouver cet article et ces informations sur mon site www.cecileplanchaisdesign

 et sur le Magazine H2o.